DÉFENSE SOCIALE

DÉFENSE SOCIALE
DÉFENSE SOCIALE

Mouvement d’idées s’inspirant des sciences de l’homme, la défense sociale tend à orienter la politique criminelle vers la prévention de la criminalité et la récupération du délinquant.

Au sens propre et premier du terme, l’expression s’applique à la protection de la société contre le crime. Toute société organisée suppose en effet un ordre légal (ubi societas, ibi jus ), et le crime est l’atteinte la plus grave qui soit portée à cet ordre établi par la loi. La lutte contre le délinquant est donc comparable, à certains égards, à la guerre contre l’ennemi extérieur et, à l’origine, toutes deux tendent également à l’anéantissement de l’adversaire. Or, de même qu’il existe une science des armes et un art militaire, de même la manière de conduire la lutte contre le crime constitue la «politique criminelle», à la fois art et science, dont l’objet est l’organisation rationnelle de la réaction sociale contre la délinquance.

1. Évolution

De la vengeance expiatoire à la politique criminelle

La réaction contre le crime est d’abord irrationnelle et consiste en une vengeance expiatoire. La conception théocratique, où le crime se confond avec l’offense à la divinité, se maintient longtemps, et jusqu’à la fin de l’Ancien Régime la lutte contre le délinquant tient à la fois du réflexe primitif de défense et du désir obscur d’exorciser le crime. Il faut arriver à l’âge des Lumières pour que commence à s’élaborer une politique criminelle proprement dite; mais cette politique nouvelle cherche alors autant à limiter qu’à organiser la réaction étatique anticriminelle. Montesquieu, Beccaria, Bentham et Feuerbach édifient un système de légalité où le citoyen qui a rompu le contrat social sera puni, proportionnellement à sa faute personnelle, dans les termes de la loi. Le Code pénal français de 1791, après la Déclaration des droits de l’homme, condamne les supplices anciens, la torture, la procédure inquisitoire, et il veut informer d’avance le délinquant virtuel de la peine qui le frapperait. La réaction anticriminelle se fonde ainsi sur la peine rétributive et la responsabilité du libre citoyen. La défense sociale, dont on ne parle guère, se confond à cette époque avec l’aménagement technique des délits et des peines.

Tout change à la fin du XIXe siècle, lorsque l’anthropologie criminelle avec Lombroso, la sociologie criminelle avec Ferri et la criminologie avec Garofalo remettent en cause la répression classique. Ces positivistes sont déterministes et nient le libre arbitre; il est vain, selon eux, d’envisager le délit comme une entité juridique; le crime est un acte humain, qui s’explique par l’action des facteurs biopsychologiques et sociaux sur la personnalité de son auteur. La lutte contre le crime doit donc être organisée en fonction du délinquant individuel et du degré de danger qu’il présente pour la société; d’où l’importance attachée à la recherche de cet état dangereux (la pericolosità ), qui sera combattu, non plus par le châtiment de la faute, mais par des «mesures de sûreté» dépourvues de toute coloration morale et destinées à assurer efficacement la «défense sociale», au sens originaire du mot, qui deviendrait ainsi le but unique de la politique criminelle.

Les positivistes proposaient donc un renversement complet du système classique fondé sur la légalité, la responsabilité morale et la peine rétributive. Ce système ne fut pas renversé, mais il demeura ébranlé, et l’idée de défense sociale commença à prendre une importance d’autant plus grande que la fin du XIXe siècle avait été marquée par une augmentation de la criminalité, et surtout de la récidive. L’opinion publique, plus encore que les juristes, s’inquiétait de l’insuffisance du système ancien.

Ce mouvement en faveur d’une politique criminelle de défense sociale devait être, jusqu’à la Première Guerre mondiale, favorisé par l’action de l’Union internationale de droit pénal, constituée en 1889 par l’Allemand von Liszt, le Hollandais Van Hamel et le Belge Adolphe Prins. Le projet de Code pénal publié en 1894 par le Suisse Carl Stooss, qui s’inspirait des idées de l’Union, eut un grand retentissement, et le Code pénal norvégien de 1902 en fut la première affirmation législative. Il donnait aux juges des pouvoirs étendus pour individualiser la peine selon la personnalité du criminel ; il prenait en considération l’état dangereux et prévoyait des mesures de sûreté pour deux catégories de délinquants, sur qui la peine classique s’avérait inefficace: les anormaux ou déficients mentaux et les multirécidivistes ou délinquants d’habitude. Ce sont eux qui font l’objet également de la loi belge du 9 avril 1930, devenue célèbre sous le nom de «loi de défense sociale». En même temps, à la suite d’un mouvement législatif né cette fois aux États-Unis d’Amérique et qui se manifeste d’abord par la création de tribunaux pour enfants, les mineurs se trouvaient progressivement soustraits au système habituel de répression pour être soumis à un traitement de rééducation.

Vers une doctrine de la défense sociale

La défense sociale, au sens que prend peu à peu ce vocable, s’entend donc désormais d’une orientation de la réaction contre le crime qui vise à protéger la société par d’autres moyens que la peine rétributive et l’intimidation collective (la «prévention générale» classique, résultant de la prévision légale et de l’application judiciaire du châtiment). Entre les deux guerres mondiales, cette conception coexiste avec le système traditionnel. Les théoriciens cherchent un moyen terme, une media via , entre le néo-classicisme qui veut punir la faute et le néo-positivisme, qui se fonde sur la «périculosité»; l’Association internationale de droit pénal, fondée en 1924 par le criminaliste français J.-A. Roux et remplaçant l’ancienne Union, est foncièrement éclectique. La législation, qui produit vers 1930 d’importants codes pénaux (codes espagnol de 1928, yougoslave de 1929, danois et italien de 1930, polonais de 1932, roumain de 1936, suisse de 1937, sans compter de nombreux codes latino-américains), établit un système dualiste (parfois dit «à double voie») combinant la peine, sanction de l’individu responsable, et la mesure de sûreté, moyen de réaction contre le délinquant dangereux mais à qui l’infraction n’est pas imputable. La défense sociale, orientation partielle du système de réaction contre le crime, n’existe pas encore, cependant, comme doctrine propre.

Elle le devient après la Seconde Guerre mondiale. En 1945, le comte Gramatica fonde à Gênes un Centre d’étude de défense sociale; en 1947, se réunit à San Remo le premier Congrès international de défense sociale; en 1948, les Nations unies, décidant de prendre la direction (leadership ) du mouvement concernant la prévention du crime et le traitement des délinquants – formule qui devait faire fortune – , créent à cet effet dans leur Secrétariat général une section de défense sociale, qui favorise des études et des publications, organise des congrès internationaux et réunit dans les diverses parties du monde des groupes consultatifs d’experts régionaux. La constitution, en 1949, d’une Société internationale de défense sociale, qui, à son tour, suscite des congrès, des rencontres et des recherches et reçoit de nombreuses adhésions, achève de cristalliser le mouvement, qui trouve son expression dans le «programme minimal» adopté par cette société en 1954. La défense sociale est ainsi progressivement devenue une doctrine.

2. Caractéristiques de la doctrine

Défense sociale et humanisme chrétien

Cette doctrine présente quelque complexité. Tout d’abord, bien qu’elle soit nouvelle puisque sa formation ne date que du milieu du XXe siècle, elle se réclame d’origines lointaines. Si, en effet, le système de réaction anticriminelle de l’ancienne Europe consistait à assurer la protection de la société par l’élimination brutale du criminel, et si le système qui lui a succédé à la fin du XVIIIe siècle était fondé sur la répression, il existe une autre tradition qui tend à l’amendement, voire à la guérison du délinquant. On la voit se manifester successivement dans la maison de résipiscence (sophronisterion ) que Platon proposait d’instituer pour les criminels «curables»; dans l’affirmation par certains Pères de l’Église, comme saint Augustin, que le châtiment doit tendre non à la destruction mais à l’amélioration du coupable; dans la notion de «peine médicinale» des canonistes du Moyen Âge; dans la création par certains papes (notamment Clément XI à Rome en 1703) d’établissements de rééducation pour jeunes délinquants; dans les institutions d’éducation par le travail des Pays-Bas au XVIe-XVIIe siècle; dans le mouvement de réforme pénitentiaire des Quakers de Pennsylvanie à la fin du XVIIIe siècle et l’action en Angleterre, à la même époque et dans le même sens, de John Howard et d’Elizabeth Fry. Le mouvement de défense sociale se rattache ainsi au courant humaniste et à la tradition chrétienne.

Défense sociale, néo-classicisme et néo-positivisme

Ensuite, la politique criminelle de défense sociale, en tant que corps de doctrine cohérente, s’oppose à la fois au système néo-classique issu de Beccaria et au néo-positivisme dérivé de l’école de Lombroso et de Ferri. Au néo-classicisme, elle reproche de reposer sur une métaphysique tendant à l’absolu, sur un dogmatisme abstrait et sur des fictions juridiques, alors que le crime doit être envisagé comme un phénomène humain et social et combattu de manière concrète, la justice pénale ne pouvant jamais être que relative et devant s’assigner une véritable action sociale. Du néo-positivisme, elle conteste la base déterministe et la tendance à une politique de neutralisation indiscriminée du délinquant: elle attache au contraire une grande importance aux problèmes de responsabilité et au sentiment intime de la responsabilité qui doit devenir le moteur du système de rééducation. Tout en se proposant d’agir sur le délinquant, elle entend limiter le droit d’intervention étatique à l’égard de l’individu. Il ne faut pas oublier que la défense sociale moderne est née après 1945 d’un mouvement de révolte contre les excès du totalitarisme.

Deux conceptions

Enfin, cette défense sociale moderne peut elle-même se ramener à deux conceptions différentes. D’une part, celle qu’a développée principalement le comte Gramatica à la suite de la création du Centre de Gênes en 1945, et qui tend à remplacer le système actuel de droit pénal par un «système de défense sociale» comportant l’exclusion de la faute, de la peine, des termes mêmes de délit, de délinquant et d’infraction: seule serait prise en considération l’antisocialité, contre laquelle réagiraient des mesures extrapénales. D’autre part, celle qui a triomphé avec le programme minimal de la Société internationale de défense sociale et qu’on qualifie parfois de tendance modérée: elle entend maintenir la légalité des délits et des peines, les garanties procédurales de la défense et la fonction du juge pénal, le principe de la responsabilité et celui de la sanction; il s’agit alors, non de remplacer le système ancien, mais de le transformer de l’intérieur en utilisant à cette fin les autres sciences de l’homme. Cette conception, qui est adoptée par la majorité des adhérents du mouvement, est celle de la «défense sociale nouvelle».

3. Contenu de la défense sociale moderne

Les diverses doctrines de la défense sociale comportent un fonds commun qui, avec les nuances qui précèdent, en constitue le contenu positif. Il consiste essentiellement en trois attitudes nouvelles: à l’égard du système de réaction contre le crime en général, à l’égard du délit et du délinquant, et à l’égard de la sanction pénale, enfin.

Une réaction organisée contre le crime

La réaction anticriminelle doit, selon la défense sociale, être organisée en un système cohérent et raisonné. Beaucoup de réformes relevant de la défense sociale ont été accomplies depuis 1880 dans divers pays, mais souvent de manière sporadique, limitée ou dérogatoire à un système de rétribution légale réputé intangible. La défense sociale consiste d’abord à faire prendre conscience de la nécessité et de la signification exacte de ces réformes, puis à les systématiser en une «politique criminelle de prévention du crime et de traitement des délinquants», ayant pour objet essentiel la «resocialisation» du condamné. Dans cette perspective, la prévention sous toutes ses formes (lutte contre les taudis, le paupérisme, l’alcoolisme, la mauvaise utilisation des loisirs, l’influence pernicieuse des mass media , et organisation du dépistage des anomalies mentales ou de l’inadaptation sociale dès l’âge scolaire) est inséparable de la répression du crime; cette dernière doit s’entendre moins du châtiment d’un acte passé que d’une préparation à un avenir individuel ne comportant plus le recours au crime. L’amélioration des conditions ou du niveau de vie doit donc préparer un meilleur comportement social des individus, sans qu’il faille pour autant considérer le welfare state des pays occidentaux comme un des aspects de la défense sociale.

Dans cette conception, la technique et la dogmatique juridiques perdent leur prépondérance ancienne. Le crime n’est plus seulement une notion de droit, et la lutte contre la criminalité ne dépend plus des seuls juristes. À l’analyse juridique des éléments de l’infraction, on superpose l’examen de la situation ou de la relation criminelle, dans laquelle la victime même peut avoir sa part (la criminologie moderne développe en ce sens la «victimologie»). À l’intention, abstraite et générale, on ajoute les mobiles, concrets et personnels. La science pénale ne peut plus être isolée des autres sciences de l’homme – anthropologie, biologie, psychiatrie, psychologie, psychanalyse et sociologie – dont les enseignements serviront à orienter la politique criminelle; et celle-ci devient un trait d’union entre la criminologie, science d’observation, et le droit pénal, science normative. La défense sociale préconise une coopération étroite et continue de ces diverses disciplines. Le mouvement de prophylaxie criminelle, qui s’était fait sentir à la veille de la Seconde Guerre mondiale, et qui préfigurait la défense sociale moderne, cherchait déjà à établir dans la lutte contre la criminalité une «collaboration médico-judiciaire».

La recherche de l’individualisation

Cette manière de voir impose une attitude nouvelle à l’égard du délit et du délinquant. L’infraction, qui ne se pose plus seulement en termes de droit, ne peut pas davantage être considérée isolément de la personne de son auteur: elle en est l’expression sur le plan du comportement social. Ferri disait déjà que le délinquant était devenu le «protagoniste de la justice pénale». Au XIXe siècle, cette justice était celle du fait criminel; elle devient désormais celle de l’homme délinquant. Le XIXe siècle avait peu à peu permis au juge pénal de procéder à une certaine individualisation de la peine; les codes pénaux d’entre les deux guerres lui en font une obligation et lui attribuent à cet égard un pouvoir de plus en plus large (le code italien de 1930 va jusqu’à parler de son pouvoir discrétionnaire dans la détermination de la peine). À partir de 1945, on a cherché à organiser systématiquement l’individualisation en instituant une étude scientifique de personnalité. Le droit de l’enfance délinquante, au fur et à mesure qu’il se détachait, depuis la fin du XIXe siècle, du système ancien de répression, avait déjà institué cet examen médico-psychologique et social des mineurs; il fut par la suite prévu également pour les majeurs. Ainsi, à côté du dossier du fait, envisagé dans sa qualification légale et qui relève du juge d’instruction, apparaît un dossier de personnalité, qui relève essentiellement de l’expert. On dépasse de loin la vieille expertise mentale qui visait à doser mathématiquement le degré de responsabilité du prévenu; le dossier de personnalité moderne est complexe et résulte d’un travail d’équipe auquel médecins, psychiatres, psychologues et travailleurs sociaux, notamment, participent.

Cette intégration de l’examen de personnalité dans une procédure mise au point au XIXe siècle pour le seul jugement du fait pose nécessairement des problèmes divers; la défense sociale conduit ici à envisager des réformes de structure, dont l’une des premières consiste à donner une place et un rôle plus importants à l’expert à côté du juge pénal.

La réforme pénitentiaire

L’attitude de la défense sociale n’est pas moins nouvelle en ce qui concerne la sanction pénale. Le système classique instauré à la fin du XVIIIe siècle faisait de la peine, envisagée comme une souffrance légalement imposée au coupable, la conséquence nécessaire de l’infraction. La gravité objective du délit déterminait la gravité du châtiment, et il existait une échelle des peines (de la peine de mort à l’amende de un franc) qui correspondait à la qualification légale des infractions. Ce système, qu’étaient venu troubler l’admission des circonstances atténuantes et les réactions particulières des jurés de la cour d’assises, a perdu peu à peu sa logique interne et son efficacité. Sauf à certaines périodes ou dans certains cas exceptionnels, la peine capitale a pratiquement disparu en Europe. De même a disparu la différenciation ancienne des travaux forcés (à perpétuité ou à temps), de la réclusion, de l’emprisonnement correctionnel et de l’emprisonnement de simple police. Un mouvement, né à la fin du XIXe siècle, et consacré législativement pour la première fois par le Code pénal néerlandais de 1881, tend à l’unification des peines privatives de liberté: les pays scandinaves, l’Angleterre, les États-Unis, entre autres, notamment, ne connaissent plus qu’une seule forme de privation de liberté, la durée seule de l’internement variant suivant le crime. C’est là encore une des thèses de la défense sociale, qui soutient que la punition du délinquant consiste dans cette seule privation du droit d’être libre, sans qu’on doive aggraver la réclusion de rigueurs supplémentaires (fers, cachots, encellulement, obligation au silence, port de la cagoule). Par là se réalise la réforme pénitentiaire , où s’exprime le plus complètement la finalité de la défense sociale: le régime en général et les établissements en particulier doivent être organisés de telle façon qu’ils préparent, aussi efficacement que possible, le retour du condamné à une vie régulière après sa libération; la réinsertion sociale (ou resocialisation) devient ainsi le but premier de la peine privative de liberté.

Cette position conduit à rejeter les courtes peines, qui ne permettent ni rééducation, ni formation professionnelle, ni amélioration morale; à ne plus séparer artificiellement peines et mesures de sûreté, car les unes et les autres ont la même finalité sociale, en même temps qu’elles sont psychologiquement ressenties ou vécues de la même façon par le condamné; à éviter la prison classique, dont les pénologues modernes dénoncent le caractère criminogène, dans le plus grand nombre de cas, et particulièrement pour les mineurs et les jeunes adultes, pour la remplacer par des méthodes de traitement scientifiquement étudiées. Le traitement peut être appliqué en institutions (par exemple la prison-école pour jeunes ou la prison-hôpital pour psychopathes), dans des établissements ouverts ou en régime de semi-liberté, ou encore en «cure libre», c’est-à-dire sans internement. Les idées de défense sociale ont beaucoup contribué au développement de la condamnation avec sursis, de la libération conditionnelle, de la liberté surveillée, des peines de substitution, de la mise à l’épreuve ou probation (dérivée du probation system anglo-américain). Dans ce dernier cas, le condamné n’échappe pas seulement à l’incarcération, comme dans la condamnation avec sursis, mais fait l’objet d’une assistance rééducative (confiée à un agent de probation sous la direction du juge de l’application des peines). L’assistance postpénale (aftercare ) pour les détenus libérés se rattache à la même conception générale; et c’est elle encore qui, à côté ou à la place de l’ancienne privation de liberté, cherche à développer, en les aménageant avec soin, une série de mesures simplement restrictives de liberté (interdictions ou suspensions de certaines activités ou de la faculté de fréquenter certains lieux), dont l’objet est d’éviter que le condamné ne retombe dans les tentations ou ne se retrouve dans les situations qui ont favorisé sa chute dans la délinquance.

Le développement du mouvement et la diffusion des idées de défense sociale ont eu ainsi des conséquences tant sur le plan des doctrines que sur celui des institutions en vigueur. Du point de vue doctrinal, certains auteurs se sont opposés, parfois de manière violente, aux théories de la défense sociale, en n’y voyant qu’un positivisme matérialiste qui menacerait la légalité des délits et des peines et les principes fondamentaux du droit: la critique visait, en réalité, la «défense sociale» de la fin du XIXe siècle. D’autres, plus avertis de l’évolution moderne, ont, tout en admettant beaucoup des points de vue de la politique criminelle de défense sociale, discuté la primauté donnée à l’amendement ou à la réinsertion sociale du délinquant, en soutenant que la peine devait avant tout exprimer le blâme social et conserver sa fonction rétributive. Ces derniers points n’étant pas fondamentalement contestés par les partisans de la défense sociale, il s’est opéré un rapprochement des doctrines et on a vu se constituer une école, ou du moins une tendance néo-classique renouvelée qui, sur le terrain pénitentiaire en particulier, se déclare prête à coopérer avec les écoles, ou les tendances, de la défense sociale nouvelle.

Du point de vue du système en vigueur, les idées de défense sociale agissent à la fois sur l’application des règles existantes, notamment dans le régime d’exécution des peines, et sur la préparation des réformes en matière pénale ou pénitentiaire. C’est ce qui est apparu, à des degrés évidemment différents, pour les processus de révision dans des pays aussi divers que l’Allemagne, l’Italie, la Suisse, la Grande-Bretagne et le Canada, et surtout les pays scandinaves, où les réalisations positives furent les premières et les plus significatives. On a pu dire, en ce sens, que le Code pénal suédois de 1962 était un «Code de défense sociale». Il témoignait en tout cas de la possibilité législative d’inclure dans un système de droit pénal un régime de protection conjuguée de l’individu et du corps social, en vue d’une meilleure adaptation de l’homme aux nécessités de la vie en société.

Défense sociale doctrine qui préconise des mesures de réinsertion sociale adaptées à la personnalité du délinquant.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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